Le Bulletin des APM
Volume XII, numéro 2, automne 2022
Le premier numéro de ce Bulletin a paru en mars 2011. Nous avions alors une dizaine de fonds. Depuis, les APM se sont enrichies de journaux personnels, de correspondances et autres écrits autobiographiques, des chercheuses et des chercheurs sont venus les consulter, des personnes liées aux archives ont donné des conférences, ont participé à des émission de radio et de télévision pour nous faire connaître et nous n'avons cessé d'accueillir de nouveaux fonds. Depuis l'automne dernier, les APM ont reçu le fonds de Madeleine Morisset-des Rivières de Québec (APM87) et de Lorraine Cousineau (APM86). La famille Bélanger a ajouté au fonds Brouillet-Bélanger (APM67) une généalogie accompagnée de notices biographiques des ancêtres Bélanger depuis 1659. Cécile Vanasse (APM37), la famille Stanton-Gamache (APM76) et Jeanne Maranda (APM80) ont joint à leur fonds de nouveaux documents. L'archiviste Rachel Marion a traité les fonds Guy Ménard (APM87) et Faribault-Pepin (APM 84) qui sont maintenant disponibles pour la consultation.
Ce 24e numéro du Bulletin a un thème : Paris. On trouve aux APM des lettres et des journaux personnels dans lesquels voyageurs et voyageuses expriment leurs premières impressions de la grande capitale. Annick Desmarais, Hugo Lavoie et René Saint-Louis ont gracieusement offert de lire des textes qui sont accessibles sur le site des APM. Vous pouvez les écouter sur Sound Cloud https://soundcloud.com/archives-passe-memoire
150 ANS DE SÉJOURS À PARIS
Le Bulletin s'est déjà penché sur les journaux de voyage. Il y a dix ans, il y consacrait un numéro dans lequel on peut trouver une bibliographie sur le sujet. Lieu de prédilection de bien des Québécois et Québécoise, Paris a inspiré de belles pages dans les journaux personnels, dans les lettres ou dans les mémoires déposés aux APM.
Celle que Walter Benjamin a appelé la capitale du XIXe siècle, n'a pas perdu son titre au XXe. On y va un peu comme on va à la Mecque, non pas dans un but religieux mais plutôt culturel, pour visiter ses sites obligés, le Louvre, la tour Eiffel, les quais, mais surtout pour respirer l'air de Paris, flâner dans un café et se baigner dans une ambiance qui émerveille mais ne dépayse pas tout à fait.
Dans plusieurs lettres et journaux conservés aux APM se cachent des premières impressions de Paris. En 1881, le marchand Joseph Godin (CA12) va y chercher des fournitures pour son magasin de chapeaux à Montréal. Il tient un journal dans lequel il énumère les sites et monuments visités, et nous livre quelques surprises. Au Jardin des plantes : « On y montre un squelette du jeune musulman fanatique qui assassina le général Kléber », qui ne choque en rien la France coloniale. Le soir, dans les cafés où « une actrice savait relever sa robe quasi invisible au-dessus de sa tête avec un art diabolique », lui valent ce jugement : « Ce sont de vrais nids de prostitution publique ».
Ida Gauthier (APM43), née à Québec, enseigne le français à Cuba puis dans un collège américain, ce qui justifie plusieurs voyages en France dans les années 1920-1930. Elle note ses occupations, ses visites culturelles et son magasinage dans de petits carnets. Lors d’un premier voyage en 1921, elle parcourt les grands magasins et ne manque pas une soirée aux Folies Bergères. À l’été 1923, elle fait un voyage d’étude et suit les cours de l’Alliance française ainsi que des cours à la Sorbonne. En 1925, théâtre, opéra (Hérodiade), expositions (Petit Palais), concert à la Place des Vosges. En 1934, son séjour est d’abord culturel : l’exposition Le Nain au Petit Palais l’enthousiasme; Poil de carotte à la Comédie française, beaucoup moins.
En août 1937, la québécoise Hévéa de Sales Laterrière (APM 24) va dans la capitale française rencontrer son fils François, étudiant en médecine. Ensemble, ils iront s’émerveiller à l’Exposition internationale de Paris, explorer les Grands boulevards et autres lieux convenus.
Le clerc de Saint-Viateur Lucien Charbonneau (APM38) passe par Paris en route pour Rome où il poursuivra des études. Il parcourt la ville dans tous les sens, trouve que « le café parisien est âcre, noir et imbuvable. Je déjeune donc sans beurre, sans lait, sans toasts, sans céréales » et que les parisiens sont peu agréables.
Quelques années plus tard, Lucienne Maheu (APM54), qui loge à la Maison canadienne pendant ses études, souligne aussi la « dureté » des Parisiens.
Tout autre est une première impression enthousiaste de Serge Lafrance (APM16) qui, à 20 ans, en 1967, est admis à la prestigieuse école Camondo. Dans cette chambre avec vue sur les toits, il prend son premier repas parisien : « J’achetai une demie baguette, un quart de vin rouge et un fromage, emmenthal suisse avec une pomme. Ce fut un régal. Depuis chaque fois que je goûte ce fromage suisse je me retrouve instantanément de Paris ».
Pour le fidèle diariste Pagesy (APM14), un séjour à Paris en janvier 1998 constitue essentiellement luxuriance de concerts et d’expositions dont on trouve la critique dans son journal.
Quand, en 1998, Gisèle Guertin (APM75) amène sa petite-fille à Paris, ce n’est pas que pour une randonnée en bateau-mouche, un coup d’œil sur la tour Eiffel, un arrêt chez les bouquinistes de la Seine, c’est aussi pour visiter « le plus grand musée du monde » où on ne peut pas toucher les œuvres d’art.
On savait avant de partir qu’on allait, qu’il fallait même, s’émerveiller dans la Tour Eiffel, Notre-Dame et les Invalides. On allait les trouver superbes et remarquables. C’est plutôt dans la vie quotidienne, la rencontre avec la concierge ou la fruitière, qu’on accède à plus de spontanéité.
Je me permets de citer Jacinthe Archambault, dans le Bulletin de novembre 2012 :
"Plus profondément, [le journal de voyage] constitue aussi un écrit sur soi. À travers les descriptions des paysages, des gens rencontrés, du récit des événements et des lieux visités, les voyageurs écrivent, plus ou moins consciemment, à propos d’eux-mêmes, sur leur vision du monde, leurs aspirations, leurs sentiments, leur recherche de sens, enfin sur leur identité personnelle et culturelle".
Pour relire les textes sur les journaux de voyage aux APM : https://www.archivespassememoire.org/bulletin/bulletin-de-apm-volume-ii-num%C3%A9ro-2
COMPTES-RENDUS
de fonds déposés aux APM
FONDS GISÈLE GUERTIN APM75
Cette poète de la région du Richelieu commence à tenir un journal poétique à l'été 1983. Jusqu'en septembre, elle note ses poèmes et les illustre parfois de photos. Puis la prose lyrique entrecoupe les vers et s'impose au gré des mois. Dans une prose empreinte de poésie, elle décrit ses émotions, ses sentiments, note parfois ses lectures, puis avec le temps témoigne aussi de son quotidien. Sans s'apitoyer, elle évoque les épreuves de sa vie, la perte d'un fils, le divorce. Et toujours revient la présence de la rivière, le Richelieu. Sans cesse, nature sert de prétexte à ses introspections, l'inspire et la mène à témoigner de « ses saisons intérieures ».
Elle s'interroge sur son écriture, ce « geste prolongé de l'âme ». « Écrire c'est prendre possession d'un territoire intérieur ». (31 janvier 1984). Elle n’écrit pas pour la postérité, mais pour l'amour des mots, pour elle-même.
En 2015, Gisèle Guertin entreprend son « récit de vie » Visible au loin, ou plutôt son autobiographie : son enfance à Saint-Antoine-sur-Richelieu où elle est née en 1936, ses années d'étude à l'École normale Saint-Joseph de Saint-Hyacinthe 1952-1953, ses débuts dans l'enseignement, son baccalauréat en éducation, son mariage, sa formation en massothérapie. On retiendra sa description de son expérience d'institutrice dans une école de rang, chargée d'une trentaine de jeunes dans une seule classe, pour un salaire de 1000$ par année dans les années cinquante, ce qui n'incluait pas le bois de chauffage, même si l'enseignante était logée à l'école.
Dans son journal, dans ses chroniques, ses nouvelles et divers récits dédiés à ses petits-enfants, elle se remémore son enfance sur une ferme, les événements marquants l’arrivée de l’électricité en 1946 : « L’électricité nous ferait ressembler au reste du monde ». Et la fin de la guerre quand « les cloches de toutes les églises avaient sonné en même temps… Oui, la guerre était bien finie, celle que nous avions gagnée par nos chapelets les bras en croix et nos coupons de rationnement ».
Gisèle Guertin est une styliste, le souci de l'écriture ne la quitte jamais. On lui sait gré d'avoir conservé ces « perles de vie ».
S'ajoutent à son œuvre poétique et à se écrits personnels, ses journaux de voyage, dans les Antilles, en Thaïlande et à Paris en 1998 avec sa « petite-fille adorée » de 12 ans.
Elle a aussi publié deux recueils : Givre d'été (1979) et Jardins de la mémoire (1997).
CITATIONS
Les moments les plus réussis ne sont-ils pas ceux-là qui semblent n'avoir d'autre objet que la rencontre totale avec soi-même. Octobre 1983
Visiter un pays, n'est-ce pas, en quelque sorte, en prendre possession par le dedans, lui faire une place dans la géographique du sang; c'est établir un lien réel, différent de celui créé par une lecture, un reportage, une photo. Poser le pied en sol étranger, c'est marquer la présence en soi de ce sol, de l'air qu'on y respire, de l'herbe qui y croît, de l'arbre qui parle le vent familier, de la terre sur laquelle pèse le sang de tous ces frères inconnus. À vol-de-nues, 1998
DE LA COLLECTION AUTOBIOGRAPHIQUE
Jean DUPONT CA33
À 61 ans, en mars 2000, Jean Dupont (CA33), affligé d'une condition cardiaque, réunit des réflexions accumulées depuis 1990. Il le fait « l’intention de mon épouse, de mes enfants, et de tous ceux qui pourront trouver un intérêt à connaitre mes réflexions ». Plus qu'une succession de réflexions, il nous présente l'histoire de sa vie.
Il vit sa jeunesse dans les conditions difficiles d'une famille de colons, petits cultivateurs dans la région de l'Islet pendant la Crise économique des années 1930. Il décrit les travaux ménagers et les travaux de la ferme et rappelle les anecdotes de son enfance à l'école de rang, avec les punitions, les mauvais et les bons coups. Dans les écoles de rangs, l'éducation cessait après la 7e année et c'est la fin des études pour Jean Dupont.
On retient la description de son travail avec son père sur les chantiers, des privations durant la guerre, ainsi que ses réflexions sur le contrôle du clergé sur les livres. Il rappelle la politique à l'époque des Bleus et des Rouges, quand chacun avait son clan et qu'on se répétait des anecdotes sur les politiciens.
Il raconte ses fréquentations avec Solange : ils s'épouseront en 1957 et s'installent à Naudville au Lac Saint-Jean. Malgré son « manque d'instruction », Jean Dupont obtient un poste dans la Sûreté provinciale pour un salaire de 125$ pour une semaine de 84 heures. Puis agent de sécurité chez l'Iron Ore de Shefferville en 1952, suivi d'un poste au Service de protection d'Hydro Québec où il termine sa carrière après 27 ans. Ces expériences nous valent ses témoignages sur le développement de la Côte-Nord, de ses mines et de ses premières villes Port Cartier, Gagnon, Manic, Hauterive.
Il vivra une retraite heureuse jusqu'à ce que surgissent des problèmes cardiaques. Mais ses pontages coronariens lui accordent une deuxième jeunesse.
Son récit dépasse la simple description des événements qui l'ont marqué. Entrecoupée d'observations et de commentaires sur les épisodes dont il a été témoin, son autobiographie dévoile tant sa vie personnelle que le monde dans lequel il évolue.
CITATIONS
L’été, je travaillais sur la terre du rang des Moreau. C’était surtout le temps où Papa faisait de la terre neuve. Il fallait essoucher, brûler les débris de bois, ramasser les roches en surface, labourer avec une charrue tirée par trois chevaux, et mettre en surface les roches déterrées par le labour. Ensuite, il fallait ramasser les roches avant de semer. Les plus grosses étaient trainées par les chevaux ou roulées sur une traine, et celles qui pouvaient être levées à bras, étaient chargées sur un tombereau. Elles étaient ensuite empilées en énormes tas là où elles ne pouvaient plus nuire. C’est le travail le plus dur physiquement que j’aie eu à faire. Il fallait en manger du “lard salé” pour maintenir la vigueur de nos bras. Le circuit travail sur la ferme en été, en forêt l’automne et l’hiver était un cercle vicieux de durs travaux et parfois d’exploitation sordide d’où̀ ne pouvait sortir que de la pauvreté.
J’ai travaillé d’abord à la garde des édifices gouvernementaux... Une nuit, vers deux heures du matin, le premier ministre Duplessis sortait de l’édifice A, à la porte de la Grande Allée.
En attendant son chauffeur, il jette un coup d’œil au livre qui était sur mon bureau. C’était l’un des tomes du Manifeste de Montesquieu ou De l'Esprit des lois. Il m’indique du doigt une citation de Démosthène sur le coin supérieur d’une page-titre d’un chapitre du livre. Cette citation que je n’avais pas remarquée disait: “Celui qui exerce le pouvoir finira toujours par en abuser”. Il me dit ensuite d’une voix sentencieuse: “Si tu continues à lire des choses comme cela, tu ne mèneras jamais rien”.
Par la suite, quand il me voyait il me saluait en m’appelant “Maitre Dupont”. Evidemment, le titre me resta collé à la peau et me valut bien des taquineries de mes compagnons de travail. Ce fut la fin de mes emprunts à la bibliothèque du parlement car les clés nous en furent retirées et placées avec celles à n’être utilisées qu’en cas d’urgence.
NOS LECTURES
Marie Lavigne et Michèle Stanton-Jean, Joséphine Marchand et Raoul Dandurand. Amour, politique et féminisme, Montréal, Boréal, 2021. 389 pages.
Les historiens et les historiennes (en particulier des femmes et du monde politique) connaissaient déjà relativement bien Marchand et Dandurand. La première, féministe et journaliste, a créé et dirigé l’ancêtre des magazines destinés aux femmes, le Coin du feu (1893-1896). Le second, homme politique et diplomate libéral, a siégé au Sénat canadien et a été délégué du Canada à la Société des Nations (SDN), qu’il a aussi présidée.
Tous deux avaient laissés des « écrits de soi » qui s’étaient vus publiés bien après leur mort: Joséphine Marchand un savoureux Journal intime et Raoul Dandurand des Mémoires. Or, ni la femme de lettres ni le diplomate n’avait encore fait l’objet d’une biographie.
Le projet de Lavigne et Stanton-Jean (deux des membres du Collectif Clio, derrière L’histoire des femmes depuis quatre siècles en 1982) était d’abord de faire la biographie de Joséphine Marchand, un personnage qui gagnait à être revisité pour être mieux compris. Mais à la lecture de quelque 700 lettres échangées par la journaliste et Raoul Dandurand et conservées depuis 2010 à la Société d’histoire d’Outremont, en découvrant « la grande connivence » de ce couple, l’interdépendance de leurs destins leur est apparue comme un bon fil conducteur. Les autrices ont su exploiter finement leur idée.
En effet, en retournant aux sources (notamment les versions originales du journal intime et des mémoires – qui diffèrent des versions publiées – et des centaines de lettres, échangées entre eux et avec des membres de leur famille, amis ou collègues;) et en s’appuyant habilement sur les différentes études (en histoire, science politique, littérature) à leur disposition, les autrices ont su tisser un récit qui conjugue les deux destins. Joséphine Marchand et Raoul Dandurand, soutiennent-elles, n’ont pu accomplir ce qu’ils ont accompli qu’« en s’appuyant, en s’épaulant et en étant aussi visibles et engagés l’un que l’autre », donc en étant ensemble.
Nous avons particulièrement apprécié les chapitres qui éclairent les zones restée dans l’ombre de la vie de Joséphine Marchand. On mesure aussi davantage sa contribution comme écrivaine, notamment dramaturge. Était aussi moins connu le combat qu’a livré Joséphine, au début du XXe siècle, pour une politique publique dans le domaine des arts (elle plaide notamment dès 1901 pour la création d’un conservatoire national). Surtout, les dernières années de la vie de Joséphine restaient enrobées de mystère. On la savait malade, mais cette biographie montre que sa maladie des reins la tenait souvent clouée au lit ou l’obligeait à se déplacer en fauteuil roulant.
En ce qui concerne Raoul Dandurand, on connaissait bien le libéral modéré qui a accompagné Félix-Gabriel Marchand (son beau-père), Wilfrid Laurier et Mackenzie King dans les arcanes du pouvoir, mais on mesure mieux, dans cet ouvrage, la teneur de son influence politique. On connaissait le pacifiste, le progressiste, l’anticlérical, le diplomate, et le fondateur du Collège Stanislas, mais beaucoup moins… le féministe. En effet, le chapitre 10, « Raoul, le féministe », fait découvrir un homme qui, lors d’une séance du Conseil national des femmes de 1913 où son épouse, malade, n’a pu se présenter pour livrer son allocution, s’est présenté à sa place pour excuser son absence.
Leur approche sensible, ancrée dans les écrits autobiographiques, aide à comprendre de manière plus précise, plus juste et plus nuancée l’expérience de protagonistes inscrits dans une époque, et par-là, d’appréhender de manière plus fine un espace-temps révolu.
Sophie DOUCET
L'intégralité de ce compte-rendu est publié dans la Revue d'histoire de l'Amérique française.
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Maria Stepanova, En mémoire de la mémoire, Paris, Stock, 2022. Traduction de Anne Coldefy-Faucard. 592 pages.
Le titre et bien choisi, car il s'agit bien de mémoire dans tous les sens du terme. Et pour ne pas que la mémoire se perde, tante Galys a conservé et classifié une pléthore de papiers et d'objets hétéroclites avant de décéder à 80 ans. L'autrice se trouve confrontée à une immense collection de cartes postales, de photos et d'objets qui ont jalonné la vie de Galya, la sœur de son père. Dans un coffret de bois, elle découvre des carnets, des agendas, des journaux, des coupures de presse. À cette cache, viendra s'ajouter des liasses de lettres détenues par sa mère, des papiers et des photos chez sa grand-mère
Toute cette paperasse sert de tremplin à Stépanova pour reconstituer la petite histoire de sa famille et l'insérer dans la grande histoire à partir du XIXe siècle. À partir de cette famille effacée, discrète, de professionnels, qu'elle qualifie de « gens ordinaires », ni dans le Parti ni dans la dissidence, appartenant à ce qu'on peut appeler la petite bourgeoisie, d'origine russe, française et juive, elle réfléchit sur la mémoire, fidèle ou trahie, obsessive ou trompeuse. Elles évoque de grands noms qui se sont aussi penchés sur cette mémoire reconstituée et restituée, tels Walter Benjamin, W.C. Sebald, Charlotte Solomon. Ses réflexion sur le désir de fixer la mémoire l'amène jusqu'à l'ère des innombrables photos numériques.
Cette Moscovite vit en exil à Berlin depuis mars 2022 et retournera dans son pays dès qu'elle pourra vivre en Russie en tant qu'écrivaine, c'est-à-dire sans censure. À Moscou, elle a créé le Colta, une revue culturelle et politique en ligne, indépendante du régime, qui couvrait la réalité culturelle, sociale et politique jusqu'à ce qu'elle soit interdite en mars dernier.
A.L.
On peut écouter cette entrevue avec Stepanova sur France Culture, le 14 septembre 2022 https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/bienvenue-au-club/maria-stepanova-memoires-russes-8237370
EN VRAC
Philippe Lejeune, fondateur de l'Association pour le patrimoine et l'autobiographie, en France, offre une conférence intitulée « Écrire sa vie », dans laquelle il parle de sa propre expérience de l'écriture d'un journal personnel. https://www.youtube.com/watch?v=YIY2V-kOdbA
L'équipe du Dictionnaire de l'autobiographie, dont on peut lire le compte-rendu dans le précédent Bulletin, a mis en ligne un site-compagnon du Dictionnaire ÉcritSoi https://ecrisoi.univ-rouen.fr/accueil On y poursuit la definition de concepts liés à l'écriture sur soi, ainsi que des réflexions théoriques et heuristiques sur tout ce qui touche aux textes autobiographiques. On y publie aussi des comptes-rendus et des entretiens et dans le numéro d'octobre, Françoise Simonet-Tenant nous offre un bel édito sur Annie Ernaux.
Pour nourrir vos insomnies, ou simplement pour relaxer, on peut réécouter douze émissions de France Culture sur le journal intime, enregistrées en 2017.
https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/le-journal-intime-de
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Voici une liste de sites européens dédiés aux écrits personnels, liste publiée par les Archives de la vie ordinaire (AVO) à Lausanne.
APA Association pour l'autobiographie et le patrimoine autobiographique France
APA Belgique Archives du Patrimoine Autobiographique Belgique
Archives de la Vie Privée Suisse
Archivio Diaristico Nazionale Italie
Archivio liguro di scrittura popular Italie
Deutsches Tagebucharchiv Allemagne
Écritures féminines italiennes Italie
Fondation Archives vivantes - La mémoire des familles suisses Suisse
Genèse et autobiographie France
Histoires d'ici, Ass. pour la collecte et la mise en valeur de la mémoire fribourgeoise Suisse
Lettres de guerre France
Mass Observation Grande-Bretagne
CONSEIL D'ADMINISTRATION
Maud Bouchard-Dupont, historienne
Barbara Creary, avocate
Sophie Doucet, historienne
Marthe Léger, archiviste
Andrée Lévesque, historienne
Archiviste : Rachel Marion
Les Archives Passe-Mémoire sont enregistrées comme organisme sans but lucratif. Elles sont soutenues par des bénévoles – sauf pour l’archiviste – et acceptent les dons.
Les APM sont aussi reconnues comme un organisme de bienfaisance qui remet des reçus officiels pour dons aux fins de l'impôt sur le revenu.