Le Bulletin des APM

Volume VII, numéro 2, hiver 2017

Ce Bulletin s'adresse à quiconque s'intéresse aux écrits autobiographiques, aux personnes qui ont donné des documents aux Archives Passe-Mémoire, à celles qui tiennent un journal personnel, ainsi qu'aux universitaires, par exemple en littérature, en histoire ou en ethnologie. Sept ans après la création des APM, on peut faire un bilan des genres de documents qu'on y trouve, des thèmes abordés par les diaristes et correspondantEs, des aires géographiques représentées.

Le plus ancien document recueilli remonte à 1835, le plus récent à 2016. La majorité des auteurEs viennent de Montréal car les archives régionales accueillent souvent les écrits de leur région. Néanmoins on préfère parfois confier ses documents à un centre d'archives spécialisé dans la littérature personnelle comme les APM. C'est ainsi qu'on y retrouve le récit autobiographique d'Annabelle Beaudin raconte sa vie sur la Côte-Nord (APM28); le journal d'adolescente de Justine en Gaspésie (APM27); le journal d'Aimé Bouchard-Bérubé (APM46) écrit à Kamouraska; la correspondance de Janine Lavoie (APM18) de Chicoutimi; ainsi que les documents de la famille De Salle Laterrière (APM24), de Pardalys (APM14), de la famille Louison-Renaud (APM20), et de la famille Parent-Lessard (APM41), tous de Québec. Deux diaristes écrivent des États-Unis : Ida Gauthier (APM43) a émigré en Nouvelle-Angleterre dans les années 1920 et la famille d'Arthémise Turcotte (APM40) s'est établie dans l'état de New York à la fin du XIXe siècle.

Certains journaux ou correspondances appartiennent à des périodes bien précises : durant la Deuxième Guerre mondiale, le soldat Laurent Melançon (APM26) envoie plus de 200 lettres à sa sœur, Jean Tardivel, de l'Aviation royale du Canada, et Gisèle Charbonneau entretiennent une correspondance qui se terminera par un mariage, et R. (APM20), officier dans la marine, écrit à sa mère et à sa fiancée.

Durant la tempête de verglas de 1998, à Rivière-Beaudette François Cartier (APM51) rédige son journal au jour le jour.

D'un fonds à l'autre, on peut suivre les âges de la vie : les années de pensionnat (APM24), la vie en communauté religieuse (APM12, APM30, APM39), le travail dans l'enseignement (APM36, APM43), en usine (APM33) ou dans un hôpital (APM14), la naissance des enfants (APM28), la sexualité hétérosexuelle (APM34) ou homosexuelle (APM15, APM16, APM17, APM45), les maladies, la vieillesse en résidence ou en famille. Et vient la mort qui est décrite à plusieurs époques.

Enfin trois fonds sont en anglais en tout ou en partie (APM10, APM43, APM49), tous les autres sont en français.

Pour qui s'intéresse à la consommation ou à l'économie domestique, plus d'une diariste note le prix des aliments ou de divers produits. De nombreux fonds recèlent aussi des journaux de voyage : en Europe surtout, mais aussi dans l'ouest canadien, dans les Antilles, en Afrique et aux États-Unis.

Le but des archives est de mettre ces fonds à la disposition des chercheurEs. Ce numéro du Bulletin publie le compte-rendu de la thèse de Rémi Marquette en grande partie fondée sur la correspondance du soldat Melançon (APM26). L'historienne Micheline Dumont a rédigé un compte-rendu du deuxième volume de l'autobiographie de la journaliste et scénariste Adèle Lauzon L'éducation de monsieur Go et Andrée Lévesque fait la recension du livre de Manon Auger sur Les Journaux intimes personnels au Québec.

Il faut signaler les plus récents arrivages : deux douzaines de boites contenant les papiers d'un pharmacien et poète (APM58); sept boites de R.C. (APM59); la correspondance du notaire Jules Jarry et de son neveu le père Paul Jarry de 1897 à 1934 (APM57); la correspondance de C.L. (APM55); le manuscrit autobiographique de Thérèse Francoeur et Normand Longchamps (APM56) publié depuis son dépôt; et les 30 carnets de Jean-Pierre Desbelle (APM60) qui, outre son journal personnel, contiennent ses récits de voyages illustrés de photographies. Dès que ces fonds seront traités, la notice apparaitra sur le site internet des APM.

 

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COMPTES-RENDUS

de fonds déposés aux APM

 

APM 43 IDA GAUTHIER

Les fonds d'archives arrivent parfois aux APM par des moyens détournés. C'est tout à fait par hasard que les papiers d'Ida Gauthier nous sont parvenus. Dans un immeuble de Montréal, Réjean Matte a un jour remarqué une boite contenant des papiers. Après en avoir pris connaissance et avoir obtenu la permission du locataire qui se débarrassait de ces choses inutiles, il a résolu de sauvegarder ces documents personnels qui s'étalent entre 1840 à 1934 et les a offert aux APM. Ils témoignent de la vie d'une enseignante québécoise aux États-Unis.

Née à Québec en 1876, Ida Gauthier s'est vouée à l'enseignement en Nouvelle-Angleterre où elle offre des cours de français et d'espagnol dans différentes écoles et académies avant de finir sa carrière et ses jours à Greenwich, au Connecticut. Célibataire, elle a beaucoup voyagé à Cuba, en 1921, puis en Europe dans les années 1920 et 1934 : ses deux journaux de voyage font l'intérêt de ce fonds.

Si ses visites des villes et des musées ressemblent parfois à des guides touristiques, Ida Gauthier ne manque pas d'ajouter des notes personnelles, notant les tableaux qui l'émeuvent et les endroits qu'elle aimerait revoir. Le périple européen de 1923 se termine par un mois à Paris où elle suit des cours à la Sorbonne et à l'Alliance française en diction, en phonétique et en littérature française.

En 1927, son petit agenda ne fait que noter les villes visitées – Paris, Genève, Milan, Lyon, Londres – et dresse une liste de ses tableaux préférés au Louvre.

En 1934, à partir de Paris, elle entreprend une tournée des pays basques français et espagnol avec Mrs C., une collègue américaine, et sa fille Frances. Son récit de voyage tient sur une douzaine de feuillets alors que sa compagne Mrs C. a aussi rédigé un journal plus détaillé qu'elle a par la suite dactylographié et dont nous trouvons une copie dans le fonds d'Ida Gauthier.

Bien qu'ayant fait ses études au Collège Notre-Dame de Bellevue à Québec, Ida Gauthier rédige ses impressions de voyage en anglais et ce n'est qu'à Paris qu'elle revient au français car, comme elle l'écrit : « Il me semble plus à propos d'écrire en français ».

Outre ces journaux de voyages, le fonds Ida Gauthier contient des lettres qu'elle a reçues, des certificats d'études, des photos, mais aussi des documents appartenant à sa famille. C'est ainsi que l'on trouve un livre de compte de son oncle John-J. Boyce, épicier à Québec, pour les années 1910-1918.

 

EXTRAIT:

Venise : « I should have counted how many bridges we crossed. One always would see some people crossing one bridge or the other and then we would see some gondolas plying along and there are the most attractive little corners so picturesque, so quaint. But though it was interesting, I should not care to live in Venice, and while sojourning there I would always want to live on the Grand Canal.” 1927

 

Andrée Lévesque

 

 

 

 


 

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VOS LECTURES

 

Adèle LAUZON, L’éducation de monsieur Go, Montréal, Boréal, 2017

En 2008, Adèle Lauzon, la grande journaliste des années 1960 et 1970, publiait chez Boréal, le premier volume de son autobiographie : Pas si tranquille. Presque dix ans plus tard, elle nous offre la suite : L’éducation de monsieur Go.

Je pense bien que c’est l’une des plus intéressantes autobiographies publiées ici depuis des lunes.  Née en 1931, Adèle Lauzon a eu un parcours scolaire atypique, s’étant dirigée à la faculté de philosophie après ses études secondaires. Elle  a immédiatement été aspirée par les questions politiques et le journalisme, rédactrice en chef du Quartier Latin en 1949. Déjà ses idées dérangeaient Maurice Duplessis. Elle a également fait des études en sciences politiques à la Sorbonne au tout début des années 1950.

Le premier tome se situait entre le «Plébiscite de 1942» et le «Référendum de 1980». Le second décrit son parcours après son retrait de la vie publique à cause de graves problèmes de santé mentale.

Adèle Lauzon a pris la décision d’écrire ses souvenirs au moment de l’attaque du World Trade Center en 2001. Entreprise compliquée à cause de l’état brouillon de ses archives. Mais le résultat est captivant.

On la suit dans sa première traversée de l’Atlantique, ses premières escapades sur les routes de France, ses rencontres internationales, son adhésion au communisme, ses difficultés avec sa famille à cause du genre de vie qu’elle mène, les difficultés matérielles dans la France de l’après-guerre, ses expériences amoureuses compliquées par son éducation puritaine, son mariage, son retour au Québec, son travail de journaliste à Cité Libre, au Magazine McLean's à La Presse, ainsi qu’à Radio-Canada, ses rencontres en Algérie, à Cuba, y compris celle de Che Guevara, son appréhension du nationalisme québécoises, ( ce qui nous vaut une page mémorable sur les problèmes émotifs de Pierre-Elliot Trudeau face au nationalisme,) ses aventures amoureuses, ses contacts avec le mouvement «Black power» aux États-Unis, et le mouvement étudiant un peu partout, ses déménagements et ses expériences dans le syndicalisme. On ne peut qu’appréhender quelle personnalité fascinante était la sienne durant ses heures de travail si intense et si intelligent.

En 1980, un épisode psychotique l’oblige à se retirer de la vie publique. Désormais sa vie sera moins spectaculaire. Elle a été diagnostiquée bi-polaire (et on comprend a postériori les soubresauts de sa carrière,) mais elle gère sa vie du mieux qu’elle peut. Les rares offres de travail qu’elle reçoit l’entrainent dans des exaltations intenses qui ne peuvent être concrétisées. Un nouveau mari, de vingt ans son cadet, lui permet pendant quelques années de faire face aux aléas de la vie. Et surtout sa vie avec des chats (le fameux «monsieur Go» du titre) et ses nombreux déménagements qui l'amènent à circuler entre le Plateau Mont-Royal et le quartier Côte-des-Neiges.

Chaque livre se termine par une sorte de conclusion de réflexions rétrospectives pleines de sensibilité, de lucidité et de finesse. Notamment ses rapports à la maternité. Elle explique, entre autres, pourquoi elle n’a pas adhéré au féminisme. Il n’empêche : en 1958 dans Cité Libre et en 1961, dans Le Devoir, elle avait publié des propos tout imprégnés de féminisme latent. Ces deux textes ont été choisis par les éditrices de La pensée féministe au Québec (2003) pour illustrer les opinions des femmes de son époque. «Être femme, avait-elle écrit entre autres, n’est pas une profession ou un statut social».

Micheline Dumont

Citation :

«L'amitié compte pour beaucoup  dans le plaisir de vivre que j'éprouve aujourd'hui. J'ai eu beaucoup de chance avec l'amitié, parce que je n'ai pas perdu d'amis à cause de la maladie.  Ou bien si j'en ai perdu, j'en ai aussitôt trouvé d'autres. (...) J'ai eu beaucoup de peines d'amour, mais jamais de peine d'amitié» (L'éducation de monsieur Go, p. 217).

 

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Manon AUGER, Les journaux intimes personnels au Québec. Poétique d'un genre littéraire incertain, Montréal, PUM, 2017.

 

Il faut noter d'emblée que l'étude de Manon Auger, sa thèse de doctorat (2012), est consacrée aux journaux publiés d'écrivains, soit « à la transformation d'une pratique privée en un genre littéraire ». On est loin ici des écrits de gens inconnus qu'on trouve aux APM. En littérature, le journal est passé du statut d'œuvre d'amateur souvent sans aucune prétention littéraire, (quoique des journaux de gens qualifiés d' « ordinaires » pourraient trouver une place dans des anthologies) à celui d'œuvre littéraire.

S'appuyant sur un corpus de 56 diaristes, l'auteure étudie d'abord la forme du journal, un écrit qui échappe aux normes élaborées pour définir les autres genres littéraires, qui ne se réfère à aucun code. Nul ne peut blâmer les diaristes d'avoir suivi tel plan ou d'avoir ignoré telle règle. Ces considérations sont bien éloignées de la personne qui prend son stylo ou son clavier pour exprimer ses réflexions ou raconter ses dernières expériences car le journal personnel est caractérisé par « l'absence de structure pré-établie »

L'auteure élabore toute une nomenclature pour catégoriser les différents types de journaux. On retiendra le journal posthume, publié après décès, et l'anthume, publié du vivant de son auteurE et qui peut parfois être un journal commandé par une maison d'édition. On distingue aussi le journal personnel, - soit un journal de création, soit des témoignages qui s'apparentent plutôt aux mémoires, - et le populaire journal de voyage dont on retrouve plusieurs exemples aux APM.

Les diaristes se forment, s'inventent même, par leur journal. C'est ce qui est démontré entre autres par le journal d'Henriette Dessaulles, un petit bijou des années 1870, celui de Lionel Groulx écrit « pour sa patrie et Dieu », de Joséphine Marchant à la quête du bonheur, et de Philippe Panneton misanthrope, pour ne nommer que quelques uns des textes étudiés.

La dernière partie du livre s'adresse aux spécialistes de la littérature et aborde les rapports entre la littérature et le journal. Bien des écrivains ont publié leur journal, une pratique qui a pris de l'expansion depuis une trentaine d'années. L'auteure consacre un chapitre à ces écrits personnels destinés à être lus et à leurs rapports complexes et ambigus avec la littérature : comment être à la fois intime et sur la place publique? Il y a certes une marge entre le journal d'Henriette Dessaules, qu'elle comptait brûler dans son « coffre à secrets », et les journaux publiés et peut-être même rédigés sur commande. Les œuvres ainsi offertes au public sont soit des textes inédits et rédigés pour l'occasion, ou soit sortis de l'oubli et parfois remaniés depuis plusieurs années (Louise Maheu-Fortier, André Carpentier). Partout, les écrivains-diaristes hésitent et s'angoissent– on se demande pourquoi ils acceptent ainsi de se mettre à nu -, dans leurs efforts de légitimation de cette forme d'écriture qui au départ devait rester cachée.

Manon Auger analyse à la fois la forme et le contenu des journaux, les motivations qui les sous-rendent, l'esthétique et l'éthique, et aussi l'évaluation de ces écrits de soi. Tout n'est pas acquis pour ce genre littéraire et elle remarque la difficulté pour les critiques d'accepter ces journaux pour ce qu'ils sont, c'est-à-dire chacun obéissant à ses propres règles et échappant à un modèle fixe.

Cette étude théorique émaillée d'exemples s'adresse d'abord aux spécialistes de la théorie des genres en littérature mais elle saura aussi intéresser toutes les personnes qui portent un intérêt au journal intime. Il sera d'un intérêt certain pour ceux et celles qui s'interrogent sur la validité d'un genre littéraire encore précaire fondé sur le personnel.

On peut s'interroger sur l'écart entre le nombre de journaux publiés de femmes et d'hommes, 17 et 39 respectivement. Ce n'est pas que les femmes écrivent moins, mais elles sont assurément moins publiées pour des raisons qu'il vaudrait la peine d'analyser.

Andrée Lévesque

 

Citations :

« Écrire un journal, même dans l'intimité la plus stricte, ne va pas nécessairement de soi, car c'est affirmer du même coup... son droit à la singularité et, surtout, à la parole ». p. 295.

 

 

 

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Rémi MARQUETTE, Portrait d'un « Zombie » Le récit de guerre et la construction identitaire d'un soldat inactif de la Seconde Guerre mondiale à travers sa correspondance (1942-1945). Mémoire de maitrise, UQAM, 2016.

Ce mémoire de maitrise sur la construction identitaire d'un jeune soldat est en grande partie basée sur les 234 lettres du soldat Laurent Melançon envoyées à sa sœur entre 23 juin 1942 au 20 décembre 1945. En 2011, trois ans après le décès de Melançon, un ami déposait ces lettres aux Archives Passe-Mémoire. L'étudiant en histoire de l'UQAM a admirablement su tirer partie de ce corpus pour cerner « un soldat à la croisée des chemins : récalcitrant mais résigné, volontaire mais désinvesti ». (p. 4) L'apostrophe « zombie », un terme péjoratif pour désigner les Canadiens célibataires qui ne s'étaient pas déjà portés volontaires avant 1940, est revendiqué et fièrement assumé par Melançon, enrôlé « dans une guerre qui n'est pas la sienne ». (p. 72)

Pour appréhender l'identité construite dans la correspondance, Rémi Marquette, se basant sur les études de genre et de la masculinité, et celles portant sur la correspondance migratoire et touristique, analyse finement chaque lettre, décode chaque assertion, dissèque la vie quotidienne, l'entrainement et les loisirs dans les camps militaires, ainsi que les impressions de voyage du soldat, pour en dégager l'individu tel qu'il se représente à sa famille. Car si ses lettres sont adressées à sa sœur, elle seront destinées à toute la maisonnée du quartier Hochelaga.

Les recrues se déplacent beaucoup tant au Canada qu'en Europe et Marquette a divisé son travail en deux périodes distinctes: l'entraînement militaire au Canada, de juin 1942 à décembre 1944, et le service outre-mer, en Angleterre et en Hollande jusqu'en décembre 1945. Sur les trace du soldat, Marquette souligne comment ce dernier se situe par rapport à l'Autre, comment il se révèle en se comparant, ou se contrastant, aux habitants et aux paysages qu'il découvre au Canada et en Europe: Canadiens-Anglais (méprisants, « têtes carrées »), Autochtones (exotiques et stéréotypés), Anglais (froids et sales), Écossais (sympathiques, « comme nous »), Hollandais (propres et débrouillards) et Belges (où il rencontre des « filles chics »). Son animosité restera dirigée contre les Anglais et Canadiens anglais plutôt que contre les Allemands qui demeurent toutefois l'ennemi : Melançon est avant tout un soldat canadiens-français qui s'affirme et qui refuse de chanter God Save the King tant que les Anglais ne chanteront pas Ô Canada en français! (66)

Marquette réussit à nous rendre Melançon très familier, on croit le connaître ainsi que ses relations avec sa famille, ses goûts, ses amitiés, ses inquiétudes et son tempérament. Un jeune homme populaire avec les filles, plutôt sage - ne boit pas, ne sacre pas - , capable d'amitiés solides avec ses compatriotes. C'est un éternel optimiste, - car il veut rassurer sa famille, - catholique pratiquant qui ne manque pas de décrire les églises et de noter son assistance à la messe, plutôt modeste et sans prétention, très soucieux de la propreté; capable de compassion surtout envers les Hollandais, et toujours moderne.

En effet, il est important pour un montréalais comme lui d'affirmer sa modernité fasse aux coutumes ou à la mode des gens avec qui il entre en contact. Le soldat est peut-être un zombie, mais c'est un homme. Ainsi, il affirme sa masculinité dans ses commentaires sur ses compagnons, sur leur apparence physique, - recourant sans vergogne à des propos homophobes, - et dans la répétition de ses prouesses en jitterbug sur les plancher de danse. L'étudiant qui analyse cette correspondance 75 ans après les faits sait garder son sens critique et demeurer conscient que l'image projetée par Melançon peut s'éloigner de la réalité, car le soldat se présente de façon à ménager sa famille, à atténuer leurs inquiétudes, leur crainte du danger d'abord, mais aussi leur crainte qu'il manque à ses pratiques religieuses par exemple.

Le mémoire de Rémi Marquette fournit un exemple de ce qu'on peut tirer d'une précieuse liasse de lettres et d'aérogrammes et il pose un jalon à notre compréhension de la masculinité, de la vie des simples soldats et de l'importance des écrits autobiographiques.

Le mémoire de Rémi Marquette peut être consulté à : http://www.archipel.uqam.ca/8920/

 

Pour en connaître plus sur le soldat Melançon, on peut lire le compte-rendu que Diane Gervais a rédigé du Fonds Melançon (APM26) dans le Bulletin, I, 2, de novembre 2011.

 

Andrée Lévesque

 

CITATIONS

« Nous ne prétendons pas présenter un mémoire sur les soldats « zombies », mais plutôt sur un soldat « zombie » : Laurent Melançon. Que cet homme soit représentatif ou non est impossible à déterminer. Toutefois, nous inspirant encore des travaux de Ginzburg et Poni, nous croyons que c'est dans l'infiniment petit que la science du vécu prend son sens. Or, la lettre est très intéressante puisqu'elle nous renseigne à la fois sur l'individu qui écrit, la société qu'il habite et le contexte qui l'entoure ». (38)

 

« Même si Melançon s'efforce d'abaisser les attentes de sa famille par rapport à son retour, il s'en préoccupe manifestement. Fils de la Grande Dépression, il parlera aussi de ses craintes par rapport à l'emploi, des cours de réintégration qu'il suivra et de son impatience à retrouver la 'chambre bleue' de la 'pension Melançon' ». (137).

 

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EN VRAC

 

Les Archives Passe-Mémoire sont fières de contribuer aux événements du 375e anniversaire de Montréal en présentant l'exposition « Lutter c'est vivre!!! Du choc des idées jaillit la lumière.  Éva Circé-Côté, libre-penseuse montréalaise (1871-1949)» sur Éva Circé-Côté, à la Maison de la Culture Notre-Dame-de-Grâce, (3755 rue Botrel), du 18 novembre 2017 au 28 janvier 2018. Ce projet est conçu et réalisé par Danaé Michaud-Mastoras et la designer graphiste Camille Ouellet-Morissette en collaboration avec le Musée de l'imprimerie du Québec.

Nous attirons votre attention sur la sortie du dernier numéro de la revue de l'autobiographie La Faute à Rousseau. Elle porte sur le thème de la perte : on perd son chemin, on perd son travail, on perd un manuscrit, on perd même la mémoire, mais parfois « qui perd gagne ».

Fondée par celui qu'on nomme « le père de l'autobiographie », Philippe Lejeune, cette revue française sort deux fois par année, fait la recension des écrits personnels et traite de la littérature autobiographique. Elle devrait se trouver dans toutes les bonnes bibliothèques.

http://autobiographie.sitapa.org/nous-avons-lu-nous-avons-vu

http://autobiographie.sitapa.org

L'Autobiosphère est une autre référence sur les écrits autobiographiques : https://autobiosphere.wordpress.com

Et en anglais, en libre accès, The European Journal of Life Writing http://ejlw.eu

 

Vient de paraître: Le Dictionnaire de l'autobiographie. Écritures de soi de langue française, sous la direction de Françoise Simonet-Tenant et son équipe, (Paris, Honoré Champion, 2017). Cet ouvrage regroupe 457 articles de plusieurs pays de la francophonie, dont quelques uns du Québec et s'étend du Moyen-Âge à aujourd'hui. Comme il est dit dans l'introduction : « Le dictionnaire s’intéresse donc à toutes les écritures de soi, sans hiérarchie, postulant qu’une écriture à la première personne du singulier non fictionnelle pense et dit quelque chose d’irréductible que l’on ne trouvera pas ailleurs. »

Le Dictionnaire de l'autobiographie se veut le pendant francophone de l'Encyclopedia of Life Writing. Cette encyclopédie en deux volumes, est publié en 2001 à Londres chez Fitzroy Dearborn sous la direction de Margaretta Jolly. S'y trouvent quantité d'articles de qualité, rédigés par des spécialistes, qui vont d'Abélard à working-class. Un ouvrage de référence extrêmement précieux pour quiconque explore le vaste champ des écrits à la première personne.
Travis Elborough, dir., Our History of the 20th Century : As Told in Diaries, Journals and Letters, (Londres, Michael O’Mara Books, 2017), nous fait connaître un siècle d'histoire à travers les écrits personnels d'une centaine de témoins Britanniques plus ou moins connus.

Lucia Boldrini et Julia Novak, dir., Experiments in Life-Writing : Intersections of Auto/Biography and Fiction, (Londres, Palgrave, 2017). Fiction ou réalité? Dans ce recueil d'articles, des universitaires de différents pays tentent de cerner la part de fiction dans les écrits sur soi et la part autobiographique dans les textes de fiction.

Les personnes qui s'intéressent aux genres autobiographique et biographiques peuvent s'abonner à la liste de l'International AutoBiography Assocation (IABA) Memory Studies Association https://www.memorystudiesassociation.org/

https://sites.google.com/ualberta.ca/iaba/home?authuser=1

https://auto-biography.org/about-autobiography-society/

http://biographysociety.org/?subscribe=success#blog_subscription-5

 

Nous vous rappelons que vous trouverez les Archives Passe-Mémoire sur Facebook https://www.facebook.com/apm.passememoire/ Le site est entretenu par Sophie Doucet.

Nous tenons à remercier les personnes qui ont donné de leur temps pour les APM, entre autres Diane Saint-Georges et Normand Hébert.

 

Les Archives Passe-Mémoire sont enregistrées comme organisme sans but lucratif. Elles sont soutenues par des bénévoles – sauf pour l’archiviste Denis Lessard – et acceptent les dons. Il nous est cependant impossible de remettre des reçus pour dons déductibles d’impôt pour le moment.

 

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